Ensembles
On pourrait présenter Ensembles comme un projet transcrivant le caractère énigmatique des choses.
À l’origine de ces associations, des images qui apparaissent, m’apparaissent, surgissent, au détour d’une déambulation, d’une promenade.
Ces photographies représentent des éléments épars, parmi lesquels on peut identifier : un morceaux de pylône, une plante qui s’agite dans la nuit, des taillis touffus, une marine obscure, un panneau caché.
Sans une thématique préalable déterminée, sans unité de lieu ni unité de temps, se dessine néanmoins une forme de conversation entre naturel et artificiel. Aux éléments manufacturés viennent répondre des éléments organiques. Les plantes frémissent, jaillissent, explosent presque parfois pourrait-on penser, tandis que la structure du panneau s’élance et se détourne, que le rideau frissonne. La totalité vibre.
Les choses sont parfois montrées de manière parcellaire : le palmier dont on n’appréhende que l’ombre, la fenêtre noire en arrière-plan, le poteau tronqué, les voilà fragmentées, incomplètes. De même, certains éléments font écran : une barrière, ces ronces fleuries mais hirsutes qui empêchent le regard de passer au travers. Naît alors une dialectique du visible et de l’invisible, en effet les choses montrées cachent autant qu’elles dévoilent. En parallèle de quoi, les cadrages serrés, extirpant les sujets à leur contexte, participent à leur conférer une présence nouvelle. « Parce qu’elle est soudain là autrement que d’habitude, la chose photographiée nous renvoie à un sentiment plus fort de l’existence. » rappelle Jean-Claude Lemagny. Ainsi ces éléments souvent anodins, parfois oubliés des regards, prennent ici un relief nouveau.
Ce qui relie les images entre elles reste un fil assez ténu. Si chaque photographie comprend intrinsèquement une part de mystère, et une autonomie certaine, c’est pourtant la présentation de ces images sous forme d’ensembles qui permet d’incarner et de rendre sensible l’énigme des choses, dans des échos irréguliers. C’est leur rapprochement en dyptiques, en triptyques fractionnés, sous-ensembles à leur tour associés pour former les ensembles, construits, qui va participer au frémissement et à la friction.
Mes ensembles sont des images qui fonctionnent « les unes avec les autres et en même temps », ainsi que l’indique la définition du terme, qui implique également les idées d’unité, de cohésion, de totalité, de constitution d’un tout.